Mes pensées divaguent à la lisière de la conscience. J'imagine une terre malmenée et des ouvriers vivant dans des conditions misérables. Chaque matin, les hordes de travailleurs sont avalées par l'usine qui tremble et vomit des panaches de fumées épaisses et noires. Les machines en transe hurlent, tournent et projettent leurs souffles d'enfer.
Mon imagination s'emballe. L'usine ondule, grandit et se métamorphose alors que le bruit se fait assourdissant. Des créneaux apparaissent au sommet des hautes tours, l'architecture devient grandiose. Un château émerge maintenant de la forêt. Trois tours majestueuses dominent la vallée. Mon esprit poursuit ses divagations, prisonnier de ces visions dantesques et du vacarme du métal déchaîné.
Sous ce château seraient creusées des galeries qui pénètrent dans les entrailles de la terre. Les essieux scanderaient l'avancée des wagons dans l'obscurité et l'atmosphère mortelle des couloirs. Les mineurs, arrachant le charbon aux sombres profondeurs, se seraient aventurés si loin qu'ils auraient libéré des flots tumultueux. La vague souterraine dévastatrice aurait envahi les galeries, noyant hommes et matériel et plongeant l'usine pour longtemps dans le désarroi puis l'oubli.
Le silence soudain me ramène à la réalité. L'illusion s'éloigne et ne restent plus que le vent dans les arbres et quelques oiseaux qui sifflent du haut d'une tour qui n'existe pas. S'il avait été davantage qu'une simple illusion, ce lieu aurait certainement possédé un nom. Donnons vie à cette vision. Cet édifice imaginaire, je le nomme le Hasard.